Sorti de L'IDHEC, aujourd'hui la
FEMIS, dans la même promotion que Claude Sautet, Pierre Tchernia qui disparaît
aujourd’hui, fut l'un des pionniers de la télévision française où il présenta
le journal dès 1949. « J’appartiens à cette génération qui a fait de la
télévision parce que le cinéma ne nous ouvrait pas ses portes. Et en faisant de
la télévision, nous ne savions pas que nous allions faire du mal à ce cinéma
que nous aimions tant » Grand cinéphile et concepteur de nombre d'émissions sur
le cinéma, Pierre Tchernia fut également acteur, scénariste et réalisateur
d'une dizaine de films et téléfilms dont le célèbre Viager en 1971.
Enfant je regardais avec passion
l’émission « Monsieur Cinéma » tout en notant les questions et les réponses : «
Un film de John Ford dans lequel John Wayne jouait le rôle de ‘Ringo Kid’ aux
côtés de Claire Trevor…» Tic, tic, tic… « La
chevauchée fantastique ! » Je n’avais encore jamais vu ce film et
découvrais ainsi l’un des plus grands réalisateurs de l’histoire du cinéma. Et
puis ça se corsait. On était parvenu à la 9ème ou 10ème question et le stress
montait chez les candidats : « Un film de Kon
Ichikawa en 1958 avec Rentaro Mikuni et Shoji Yasui… » Tic, tic, tic...Celui
qui répondait La harpe de Birmanie
pouvait repartir en 10e semaine avec 50.000 francs et plein de places de ciné.
Adolescent,
en connaissant déjà un rayon, je réussis à convaincre mes parents de me
présenter aux éliminatoires de l’émission. Arrivé dans les studios de la rue
Cognac-Jay, je suivis un parcours fléché qui menait vers les sous-sols. Du haut
de ses 1m90, Pierre Tchernia me reçut, un questionnaire à la main : « Allez
vous asseoir là-bas avec les autres ! ». J’avais l’impression de passer le
B.E.P.C du cinéma. Les questions étaient pour le moins ardues. Rien de vraiment
facile et rien sur Steven Spielberg et George Lucas. Le questionnaire était axé
sur des acteurs et réalisateurs pour moi inconnus, de la période du muet en
passant par le cinéma philippin. Sèche quasi-totale, je n’avais aucune chance.
Pierre Tchernia passa parmi les rangs et se pencha un instant sur ma copie.
J’avais l’impression d’être un gamin qui n’avait pas assez révisé. Surtout que
les autres dans la salle, venant de tous les coins de France, avaient déjà
répondu à tout ! Je rendis, honteux et confus ma copie à « Monsieur Cinéma » et
jurai, un peu tard, qu’on ne m’y prendrait plus.
Michel Serrault dans Le Viager (1971)
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