lundi 10 octobre 2016

Pierre Tchernia, un goût de l'enfance à jamais disparu


Sorti de L'IDHEC, aujourd'hui la FEMIS, dans la même promotion que Claude Sautet, Pierre Tchernia qui disparaît aujourd’hui, fut l'un des pionniers de la télévision française où il présenta le journal dès 1949. « J’appartiens à cette génération qui a fait de la télévision parce que le cinéma ne nous ouvrait pas ses portes. Et en faisant de la télévision, nous ne savions pas que nous allions faire du mal à ce cinéma que nous aimions tant » Grand cinéphile et concepteur de nombre d'émissions sur le cinéma, Pierre Tchernia fut également acteur, scénariste et réalisateur d'une dizaine de films et téléfilms dont le célèbre Viager en 1971.
 
Enfant je regardais avec passion l’émission « Monsieur Cinéma » tout en notant les questions et les réponses : « Un film de John Ford dans lequel John Wayne jouait le rôle de ‘Ringo Kid’ aux côtés de Claire Trevor…» Tic, tic, tic… « La chevauchée fantastique ! » Je n’avais encore jamais vu ce film et découvrais ainsi l’un des plus grands réalisateurs de l’histoire du cinéma. Et puis ça se corsait. On était parvenu à la 9ème ou 10ème question et le stress montait chez les candidats : « Un film de Kon Ichikawa en 1958 avec Rentaro Mikuni et Shoji Yasui… » Tic, tic, tic...Celui qui répondait La harpe de Birmanie pouvait repartir en 10e semaine avec 50.000 francs et plein de places de ciné.

Adolescent, en connaissant déjà un rayon, je réussis à convaincre mes parents de me présenter aux éliminatoires de l’émission. Arrivé dans les studios de la rue Cognac-Jay, je suivis un parcours fléché qui menait vers les sous-sols. Du haut de ses 1m90, Pierre Tchernia me reçut, un questionnaire à la main : « Allez vous asseoir là-bas avec les autres ! ». J’avais l’impression de passer le B.E.P.C du cinéma. Les questions étaient pour le moins ardues. Rien de vraiment facile et rien sur Steven Spielberg et George Lucas. Le questionnaire était axé sur des acteurs et réalisateurs pour moi inconnus, de la période du muet en passant par le cinéma philippin. Sèche quasi-totale, je n’avais aucune chance. Pierre Tchernia passa parmi les rangs et se pencha un instant sur ma copie. J’avais l’impression d’être un gamin qui n’avait pas assez révisé. Surtout que les autres dans la salle, venant de tous les coins de France, avaient déjà répondu à tout ! Je rendis, honteux et confus ma copie à « Monsieur Cinéma » et jurai, un peu tard, qu’on ne m’y prendrait plus.
Michel Serrault dans Le Viager (1971)

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