mardi 7 janvier 2014

L'art d'Ingmar Bergman


L’art d’Ingmar Bergman consiste à mettre en scène relativement peu de personnages quasiment en huis clos (une île  dans Persona, Une passion, A travers le miroir, un appartement dans Scènes de la vie conjugale, une chambre d’hôpital dans Au seuil de la vie…) afin d’observer et d’analyser les doutes, les désarrois, les anxiétés et les pathologies qui habitent leurs protagonistes. 
A travers le miroir (1961)

Réunissant presque toujours la même troupe d’acteurs (Harriett Andersson,  Max Von Sydow, Ingrid Thulin, Bibi Andersson, Liv Ullmann,  Erland Josephson, Lena Olin…), le cinéaste réussit à engendrer une œuvre d’une surprenante cohérence et qui, dès ses débuts en 1946, n’a cessé de rendre compte du genre humain et de ses contradictions dans des styles aussi différents que le drame, la comédie ou le film historique.
Son génie provient de cette aptitude à être parvenu à l’universalité – ce fut l’un des plus grands cinéastes du monde - avec pour méthode une étonnante économie de moyens, privilégiant ainsi l’écriture, le jeu des acteurs, la photographie, les cadrages. Digne héritier du cinéma muet et aussi célèbre que John Ford et Alfred Hitchcock, Bergman nous trouble de par son art à appréhender la psychologie humaine. Fin observateur de notre époque à travers son domaine de prédilection, la relation hommes-femmes, on pourrait presque résumer son œuvre à cette question prononcée par le personnage de Liv Ullmann  s’écroulant aux pieds de Max Von Sydow dans La honte : « Pourquoi donc ne pouvons-nous être amis ? »  Le réalisateur suédois rejoint les plus grands dramaturges de l’Histoire, de Shakespeare à Molière en passant par Woody Allen dont on comprend aisément l’admiration que ce dernier lui porta. 
La honte (1968) 
 
Si Bergman m’a personnellement beaucoup apporté sur l’humain et sa complexité, il inspira quantité de cinéastes par ses recherches (Truffaut le cita souvent en exemple), le réalisateur du Septième sceau n’ayant cessé d’expérimenter, de renouveler l’art cinématographique. Il suffit de revoir ce chef d’œuvre que fut Persona, film-phare des années 60 jamais égalé, pour en avoir la certitude. Tout Bergman est à voir ou à revoir, ne serait-ce que pour en apprécier l’intelligence du discours, la performance des interprètes (Liv Ullmann atteint des sommets dans Face to face), la mise en cadre et en lumière des processus émotionnels. Plus qu’un maître, il parvient parfois en un seul gros plan à en dire plus long qu’en un film tout entier doté de moyens faramineux. Tout élève dans une école de cinéma devrait d’abord étudier un film de Bergman, de Chaplin ou d’Hitchcock avant de partir sur les traces de Christopher Nolan.
Face à face (1976)

Les indispensables de Ingmar Bergman : Jeux d’été (1951), L’attente des femmes (1952), Monika (1953), Rêves de femmes (1955), Le 7ème sceau (1957), Les fraises sauvages (1958), La source (1960), A travers le miroir (1961), Le silence (1963), Persona (1966), Le lien (1971), Scènes de la vie conjugale (1973), Face à Face (1976), Fanny et Alexandre (1982).
  

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